En 1914, Mohand Tazerout (1893-1973) fuit les discriminations raciales de l’Algérie coloniale, après une brève expérience d’« instituteur adjoint indigène » dans une « école indigène ». En France, il devient un germanisant reconnu. Après la parution au début des années 30 de sa traduction du Déclin de l’Occident d’Oswald Spengler, il mène des recherches pluridisciplinaires dont il publie les conclusions dans des ouvrages remarqués : L’État de demain (1936), Les Éducateurs sociaux de l’Allemagne moderne (1942-1946), Au congrès des civilisés (1953-1956). Sa connaissance de l’orientalisme allemand lui permet de traduire Histoire des peuples et des États islamiques (1949) de Karl Brockelman. La guerre d’Algérie l’amène à s’engager en faveur de la décolonisation. En 1960, il signe d’un pseudonyme L’Algérie de demain, prescrivant des institutions démocratiques pour une Algérie indépendante pluraliste.
Dans Histoire politique de l’Afrique du Nord (1961), il propose une décolonisation de l’histoire, chère à son ami Mohamed-Cherif Sahli. En 1963, il conclut la réflexion sur le racisme qui avait fait l’objet d’un théorique Essai génétique sur les races, les peuples, les nations, la démocratie (1959), où il dénie tout fondement scientfique à l’idée de race. Le Manifeste contre le racisme relie le racisme au colonialisme et propose de parachever la décolonisation par un combat antiraciste. Ce dernier livre édité de Tazerout est le plus dense, car il est aussi un bilan de l’ensemble de son œuvre dont les conclusions lui servent à élucider le racisme qui, en tant que séquelle du colonialisme, constitue un des obstacles à l’apaisement des relations entre peuples qu’avaient opposés des guerres de religion, des luttes de classes et des conflits. On sait que l’œuvre de ce diplômé du Cours normal de Bouzareah pour indigènes s’est achevée par une traduction du Coran encore inédite.
Son étude des grandes civilisations lui a permis de passer des problèmes locaux à l’histoire universelle. En traduisant le Livre fondateur de l’islam, il entendait faire connaître la « fraternité adamique », prescrite par ce texte antiraciste. L’humanisme musulman lui paraissait être une contribution possible du monde musulman à débarrasser l’humanité du racisme colonial qu’il avait fui pour s’« auto-désindigéniser ».
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