Je reviens à peine d’Amboise ; j’y ai passé plusieurs jours sous le toit hospitalier de son vieux château, dans l’intimité la plus douce avec un illustre captif. Plus que beaucoup d’autres, je crois connaître désormais et pouvoir apprécier Abd-el-Kader.
Cependant, à mon retour à Bordeaux, sur mon chemin, partout, je trouve une foule de personnes, dignes d’ailleurs de toute confiance, qui se font de cet homme extraordinaire une idée fausse, incomplète, et qui, par suite, contribuent, plus qu’elles ne le soupçonnent assurément, à retarder l’époque incertaine encore où justice lui sera enfin rendue.
Je crois, moi, au contraire, que, si tous en France connaissaient Abd-el-Kader autant que je le connais maintenant, cette époque serait désormais peu éloignée.
Donc, je me figure que c’est pour moi un devoir d’humanité, en attendant que je puisse faire davantage, d’essayer de rétablir la vérité sur son compte, à l’égard de certains faits, en particulier, de fort grave et délicate nature pour la plupart, et de hâter peut-être par là le moment où se dissiperont les nuages dont elle n’est que depuis trop longtemps enveloppée.
Cette persuasion, qui m’est chère à plus d’un titre, et à laquelle j’avoue que je ne sais pas résister, sera ma meilleure excuse auprès de ceux entre les mains desquels tomberont ces quelques pages, simples, consciencieuses, et qui me paraissent devoir être aussi bien un acte de patriotisme vrai qu’un acte de charité chrétienne.
Je demande à Dieu de les bénir.
Bordeaux, le 15 mars 1849
Ant.-Ad. Dupuch
Ancien évêque d’Alger
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